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Jeanne Beauvais, Championne de France de pesto au mortier, en route pour le Championnat de Gênes
Jeanne Beauvais, Championne de France de pesto au mortier
Le 22 Décembre 2023

Jeanne Beauvais, Championne de France de pesto au mortier, en route pour le Championnat de Gênes

Parisienne de 37 ans, Jeanne Beauvais a remporté le Championnat de France de pesto au mortier en juin 2023. Une victoire qui lui permet de participer au Championnat du monde de pesto (Pesto Championship) qui se tiendra le 24 mars, à Gênes. 

 

FRANCE PIZZA. Vous êtes Championne de France de pesto au mortier, comment avez-vous vécu ce championnat?

JEANNE BEAUVAIS. Je l’ai pris comme un jeu !

 FRANCE PIZZA. Comment en aviez-vous entendu parler ?

JEANNE BEAUVAIS. Il y a quelques années, environ 7 ans, je vivais rue Rodier près de l’épicerie RAP d’Alessandra Pierini (Ndlr : Alessandra a revendu ce commerce il y a 1 an). Je suivais ce qu’elle faisait. Elle avait déjà organisé un concours, j’avais déjà participé, il y a longtemps.

 

"Mon rapport au goût et à la cuisine me vient certainement de ma mère, qui est la plus grande cuisinière – non pro – que je connaisse." 

 

FRANCE PIZZA. Votre métier est-il lié à la restauration italienne ?

JEANNE BEAUVAIS. J’ai toujours été passionnée de cuisine. Il y a quelques années j’ai suivi une formation d’un mois à l’école Ferrandi, j’avais envie d’approcher les cuisines et les techniques professionnelles. L’année suivante j’ai travaillé seule le programme du CAP cuisine que j’ai obtenu. Mais la cuisine n’est pas mon métier, je travaille au Sénat.

 

 

FRANCE PIZZA. Les métiers de vos parents ont-ils eu une influence sur votre intérêt pour la cuisine ?

JEANNE BEAUVAIS. Ma mère est auteur. Mon père est un scientifique rêveur, qui a notamment dessiné des voitures, des aéroports, des maisons, enseigné la géométrie... Les métiers de mes parents n’ont pas déterminé le mien qui est le résultat de choix et de hasards. Mon rapport au goût et à la cuisine me vient certainement de ma mère, qui est la plus grande cuisinière – non pro – que je connaisse. 

FRANCE PIZZA. Comment vous êtes-vous préparée à ce concours ?

JEANNE BEAUVAIS. Jai un certain nombre de pesto derrière moi, et je me suis entraînée intensément pendant une semaine, en préparant un pesto chaque soir !

 

« Je connais le goût de l’authentique pesto »

 FRANCE PIZZA. Quelle recette avez-vous présentée ?

JEANNE BEAUVAIS. J’ai suivi la recette du joli petit livre d’Alessandra Pierini « Le pesto, dix façons de le préparer », qu’on trouve aussi dans le plus gros – et collectif – « On va déguster l’Italie ». J’ai également observé la technique de Roberto Panizza, maestro du pesto à Gênes, dont on trouve facilement des vidéos. Comme je suis têtue, j’ai tenté au cours de mes essais de changer l’ordre des ingrédients… pour finalement revenir à leur recette originale. Il faut commencer par piler l’ail et les pignons en pommade puis, par un mouvement rotatoire, broyer finement le basilic avec quelques cristaux de gros sel. On ajoute ensuite les 2 fromages (parmigiano Reggiano et pecorino fiore sardo), et enfin l’huile d’olive.

FRANCE PIZZA. À votre avis, quels détails et particularités qui vous ont fait gagner ? 

JEANNE BEAUVAIS. Je connais le goût de l’authentique pesto genovese, ce qui m’a certainement aidée à trouver un bon équilibre entre les 7 ingrédients. Avant de commencer la préparation de mon pesto, j’ai goûté séparément chacun des produits qui nous étaient fournis. Le basilic D.O.P. est délicat, bien moins opulent et plus herbacé que la variété qu’on trouve habituellement en France. Il peut facilement être écrasé par trop d’ail ou de pecorino fiore sardo, dont le goût est puissant. L’excès de sel est aussi un piège. Il en faut, notamment parce qu’il aide à broyer le basilic, mais en petite quantité car les fromages qu’on ajoute à la fin de la préparation sont très salés. J’ai aussi prélevé soigneusement les feuilles de basilic en laissant les tiges qui n’apportent que de l’eau, aucun goût, et dont les fibres résistent sous le pilon.

 

FRANCE PIZZA. Quels sont les bénéfices de cette victoire ? Quelles rencontres cette victoire a-t-elle favorisées ?

JEANNE BEAUVAIS. J’ai reçu de jolis cadeaux, notamment un mortier (ça m’en fait deux car j’en avais déjà un, et je ne veux me séparer d’aucun d’eux !), des livres, une invitation à Voltalacarta, le restaurant génois de Maurizio Pinto, l’un des membres du jury de la sélection française, divers goodies siglés du campionato mondiale… et surtout, la chance de participer au championnat du monde au Palazzo Ducale à Gênes en mars prochain. 

 

"Ce championnat vise à faire connaître la gastronomie italienne, et l’idée d’y contribuer me réjouit". 

FRANCE PIZZA. De quelle façon faites-vous fructifier cette victoire ?

JEANNE BEAUVAIS. Avec mon compte Instagram créé à cette occasion (@jeanne._beauvais), et ma soixantaine d’abonnés (rires) ! Ce championnat vise à faire connaître la gastronomie italienne, et l’idée d’y contribuer me réjouit. 

FRANCE PIZZA. Comment est né votre intérêt pour le pesto ? 

JEANNE BEAUVAIS. Je m’intéresse au pesto parce que j’aime le manger, et que souvent, ce que j’aime manger, je le prépare. C’est en allant récemment à Gênes que j’ai compris combien le pesto représente une fierté en Ligurie.

FRANCE PIZZA. Qu’est-ce qui vous plaît autant dans cette recette ?

JEANNE BEAUVAIS. J’aime dans le pesto ce qu’il a d’élémentaire : 7 ingrédients, pas de cuisson et un unique ustensile primitif. On pourrait imaginer qu’à partir de là, tous les pesto se ressembleront, pourtant non. Les proportions, l’ordre d’introduction des ingrédients et le geste donnent une infinité de goûts et de nuances de vert possibles (du vert vif au vert foncé si les feuilles se sont oxydées). Cette apparente simplicité s’accompagne d’une sérieuse exigence sur l’origine des ingrédients : la variété du basilic D.O.P. (origine protégée) aux petites feuilles tendres et courbées qui pousse sous serre dans les environs de Gênes, l’ail de Vessalico, le gros sel de mer de Trapani, le parmesan D.O.P. affiné 24 mois, le pecorino fiore sardo D.O.P., les pignons italiens et l’huile d’olive de la Riviera ligure, au goût particulièrement doux. Basilic, pecorino, huile d’olive, parmesan, ail…Tous les ingrédients du pesto sont bons séparément.

 

"Je connais bien l’Italie, que j’aime du nord au sud, plus que tout autre pays, pour sa beauté, ses sonorités, ses musiques (les chants populaires notamment), la Méditerranée, et évidemment sa cuisine. Je m’y sens toujours bien".

 

FRANCE PIZZA.Vous souvenez-vous de votre 1ère dégustation de pesto? Quelles émotions avez-vous ressenties ?

JEANNE BEAUVAIS. Ma 1ère dégustation de pesto est trop lointaine pour que je m’en souvienne, mais je me souviens parfaitement de la dernière. C’était à la Trattoria delle Grazie, à Gênes. Le pesto n’était pas servi avec des trofie mais avec des mandilli (« mouchoirs de soie ») qui sont des pâtes ligures plates, comme de fines feuilles de lasagne. La douceur de ces mandilli déposés comme un drap froissé, couverts d’un pesto fin et généreux, faisaient de cette assiette une perfection dont je suis encore émue.

 

FRANCE PIZZA. Vous souvenez-vous du 1er pesto que vous avez réalisé ?

JEANNE BEAUVAIS. Je ne m’en souviens pas, mais ce devait être au mixeur, ce qui n’est qu’un demi-sacrilège. J’aime le préparer au mortier pour la beauté de l’outil, pour le sentiment qu’il donne de répéter un geste ancestral, et parce qu’il n’a pas exactement le même goût, mais si l’électricité avait précédé l’invention du pesto, jamais personne ne l’aurait fait au mortier !

FRANCE PIZZA. Connaissez-vous l’Italie? 

JEANNE BEAUVAIS. Je connais bien l’Italie, que j’aime du nord au sud, plus que tout autre pays, pour sa beauté, ses sonorités, ses musiques (les chants populaires notamment), la Méditerranée, et évidemment sa cuisine. Je m’y sens toujours bien. Pendant mes études, j’ai vécu 6 mois en Lombardie, à Pavia, et plus récemment, j’ai passé un mois en Sicile, à Ortigia.

 

FRANCE PIZZA. Le championnat aura lieu à Gênes, connaissez-vous cette ville ?

JEANNE BEAUVAIS. Récemment, j’ai effectué  un voyage à Gênes de mon propre chef. Il me restait quelques jours de vacances à prendre. J’ai vécu à Pavie et j’avais envie de revoir des amis. J’ai eu envie de voir Gênes, de revoir la mer. Sans le concours, je n’y serais pas allée. Je parle l’italien que j’ai pris comme 2ème langue au collège et lycée et puis j’ai vécu à Pavie.

FRANCE PIZZA. Quelles recettes italiennes maîtrisez-vous ? 

JEANNE BEAUVAIS. Ma cuisine est principalement végétale, même si je ne m’y limite pas. J’aime notamment préparer les pâtes (allo scoglio, alle vongole, aux artichauts et asperges au printemps, alla norma, lasagnes, raviolis, ...), le risotto, la caponata, la parmigiana, la focaccia, tout ce qu’on peut faire avec le poulpe et la seiche (seppie in zimmo, à l’encre...). J’ai une passion pour la sauge qui est une plante au goût complexe et sauvage (pâtes au beurre de sauge, garniture de raviolis, saltimbocca alla romana...).

 

FRANCE PIZZA. Comment vous préparez-vous pour ce championnat ?

 JEANNE BEAUVAIS. Pour l’instant, mon entraînement a surtout consisté à accepter les demandes d’invitations de mes amis après avoir gagné la sélection française pour le championnat ! Quand j’ai gagné tous ont demandé à goûter mon pesto, alors je les ai invités les uns après les autres, donc j’ai bcp d’entraînement. Mais il est difficile de trouver le basilic D.O.P. génois, qui est indispensable car il n’a ni le même goût, ni la même texture que celui qu’on trouve à Paris. De passage à Gênes quelques jours en octobre, j’ai eu la chance de rencontrer un chef qui m’a accueillie dans sa cuisine et m’a montré sa façon de préparer le pesto dans son magnifique mortier. J’en ai tiré quelques enseignements.

 

FRANCE PIZZA. Vous êtes-vous renseignée sur le profil des candidats que vous affronterez ?

JEANNE BEAUVAIS. Nous serons 100 concurrents au championnat mondial : 50 Ligures, 25 Italiens hors Ligurie, et 25 représentants de pays étrangers. Parmi eux, certains sont professionnels de la cuisine. Le championnat a lieu tous les deux ans. Je ne me suis pas renseignée sur les autres candidats, mais j’ai remarqué que sur les 8 éditions passées du championnat, 7 des vainqueurs étaient italiens, et 6 venaient de Gênes et sa région. C’est à croire que le pesto coule dans les veines génoises !

FRANCE PIZZA. Quelles sont vos passions et vos loisirs en dehors de la cuisine ? 

JEANNE BEAUVAIS. Je suis passionnée de musique, des voix et des mélodies. Je fais du chant, principalement lyrique – et surtout baroque ces derniers temps – mais j’aime presque tout chanter, tant que ça va à ma voix qui n’est pas une voix de rockeuse…

FRANCE PIZZA. Quels sont votre humeur et état d’esprit à quelques semaines de la compétition ? 

JEANNE BEAUVAIS. Ça m’amuse d’y participer, c’est un jeu. J’ai une chance sur 100. Aucune forme d’inquiétude. Si je gagnais, ça donnerait une visibilité et j’essaierais d’en faire quelque chose….

FRANCE PIZZA. Quels sont vos projets pour 2024 ?

JEANNE BEAUVAIS. Gagner le championnat du monde évidemment ! Cette compétition est un jeu, et j’ai compris qu’elle est l’occasion d’une grande fête à Gênes. Mais quand on joue, il faut le faire pour gagner, sinon c’est ennuyeux.

Propos recueillis par Isabelle Aithnard

Photos : © Jeanne Beauvais et Laure Dubuet-Routier

 

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