Monica Malavasi, Directrice de l'Istituto Valorizzazione Salumi Italiani
Monica Malavasi dirige l'IVSI (Istituto Valorizzazione Salumi Italiani) depuis 2013. Venue à Paris dans le cadre de European Authentic Taste, elle nous a éclairés sur l’importance de la charcuterie italienne et les missions que s’est fixées l’IVSI pour la promouvoir.
FRANCE PIZZA. Quelle est l’importance de la charcuterie italienne en Europe?
Monica Malavasi. L’Italie est le pays qui exporte le plus de charcuterie dans le monde. Elle détient ce leadership depuis 2016. Notre pays détient 21 AOP et 22 IGP soit un total de 43 labels au cœur d’une Union européenne qui en détient 181. Cela fait environ 24%. Les charcuteries italiennes sont les plus exportées car leurs labels offrent des garanties quant à la provenance des matières, le lien avec le terroir et aussi les personnes capables de produire cette qualité parce qu’elles ont la connaissance, l’expertise, et le respect de la tradition.
F.P. Quelle est la spécificité de la charcuterie italienne? Serait-elle supérieure à celles des autres pays ?
Monica Malavasi. Je ne sais pas si elle est supérieure mais je sais qu’elle plaît plus que les autres car elle est très naturelle. Pour produire du jambon de Parme ou du San Daniele, on n’utilise que la cuisse du porc, un petit peu de sel et du temps puisqu’il faut attendre 24 mois. Il n’y a pas beaucoup d’ingrédients dans le salami ou la mortadelle. Tous les produits qui sont maturés sont vraiment naturels. C’est la différence avec certains pays dont les produits sont préparés très vite et dans lesquels il y a beaucoup d’ingrédients. Nous, nous avons la patience. Le temps est un facteur important pour réduire les ingrédients. C’est là notre spécificité.
FP. Vers quels pays la charcuterie italienne s’exporte-t-elle le plus ?
Monica Malavasi. L’année dernière, c’était l’Allemagne suivie par la France mais ces 2 pays se disputent régulièrement la 1ère place. Maintenant c'est la France qui importe plus de charcuteries italiennes que l’Allemagne. Ces 2 pays sont ceux qui aiment le plus la charcuterie. On trouve ensuite le Royaume Uni et les Etats-Unis.
F.P. Ce secteur attire-t-il les jeunes ? Les incite-t-il à (s’)investir ?
Monica Malavasi. Oui, je pense que ça peut les intéresser pour la tradition mais aussi pour les questions de durabilité parce que le milieu y est de plus en plus attentif. Les anciens savent comment faire le jambon et transmettent leur savoir-faire aux jeunes. Ces derniers sont sensibles aux questions de durabilité et d’économie circulaire. Ils apprennent aux anciens à réduire les déchets. L’expérience des anciens et la vision moderne des jeunes engendrent un bel échange entre ces différentes générations.
FP-Qu'est-ce que l'IVSI ?
Monica Malavasi. L’Institut pour la promotion de la charcuterie italienne (IVSI – Istituto Valorizzazione Salumi Italiani) est un consortium volontaire et sans but lucratif qui représente l’ensemble du secteur de la charcuterie et qui, par l’intermédiaire de ses membres, représente toutes les tailles et tous les niveaux de producteurs de charcuterie.
FP. À quand remontent ses premières actions ?
Monica Malavasi. L'IVSI a été fondé en 1985 pour répondre aux besoins croissants des consommateurs en matière d’information et dans le but d’améliorer l’image de la charcuterie italienne. En 37 ans, l'IVSI a mis en place de nombreux programmes et interventions de communication qui ont eu un fort impact sur l’ensemble du secteur de la charcuterie italienne. Il s’agit d’une feuille de route visant à informer les opérateurs des médias, les leaders d’opinion et un public de consommateurs toujours plus nombreux, en Italie et à l’étranger (France, Allemagne, Japon, Hong Kong, Taiwan, Brésil...) de manière complète, correcte et engageante, sur les aspects productifs, économiques, nutritionnels et culturels de la charcuterie. En 2018, IVSI a présenté le « Manifeste IVSI, la charte de nos valeurs » basé sur 7 principes dont l’importance du lien au territoire, l’importance de notre tradition ou encore l’éthique et la durabilité dans le processus de production.
F.P. Quel est son rôle aujourd'hui ?
Monica Malavasi. Le rôle de l’IVSI est toujours de faire connaître la charcuterie en Italie et à l’étranger mais nous avons désormais une nouvelle mission : former nos producteurs à la durabilité. Nous assurons des formations pour leur apprendre à orienter leurs décisions et actions dans ce sens-là.
F.P. Quelle quantité de charcuterie vos compatriotes consomment-ils chaque année ?
Monica Malavasi. La consommation de charcuterie annuelle des Italiens est de 17 à 18 kg par an et par personne. Nous ne sommes pas les plus gros consommateurs. Je pense que la Chine et les Etats-Unis en consomment beaucoup plus. Les charcutiers sont de plus en plus sensibles au respect d’un certain équilibre nutritionnel. C’est pour cela qu’ils veillent à introduire moins de sel, moins de graisses donc moins de cholestérol...De son côté, le consommateur sait que les produits de charcuteries contiennent des vitamines, des protéines, du fer et toutes les choses importantes pour la santé.
F.P. En France, nous connaissons bien la mortadelle, le Parme, le San Daniele, la coppa, le speck, la pancetta, la bresaola. La n’duja, le guanciale et la spianata sont plus récents dans nos assiettes. Que nous reste-t-il à découvrir ?
Monica Malavasi. C’est une question très difficile ! En Italie, un professeur d’université, grand expert de charcuterie italienne, a recensé 700 charcuteries italiennes différentes. Donc il vous en reste encore beaucoup à découvrir et moi non plus, je ne les connais pas toutes ! (rires). La charcuterie italienne est un produit issu de la tradition et fortement influencé par les terroirs qui utilisent leurs propres produits. Au sud, on trouve le peperoncino et la n’duja. En Toscane, on utilisera du fenouil et dans le Piémont, du vin rouge. Il y a beaucoup de petits artisans en Italie, chacun fait une recette et les producteurs les plus importants font connaître leurs recettes dans le monde.
FP. Quelles sont vos charcuteries préférées?
Monica Malavasi. Ah c’est difficile ! J’aime beaucoup les produits maturés comme le salami, le culatello, les jambons cuits. Mais si je dois cuisiner, je préfère les produits cuits comme la mortadelle. J’aime aussi beaucoup la pancetta.
Propos recueillis par Isabelle Aithnard
Pour en savoir plus : www.salumi-italiani.it
