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Giacomo Iacobellis : la passion (d'écrire) joue les prolongations
Le 6 Mai 2021

Giacomo Iacobellis : la passion (d'écrire) joue les prolongations

Giacomo Iacobellis est un jeune journaliste italien qui a fait de sa passion son métier. 

Farouchement attaché au milieu des chroniques sportives dans lequel il a démarré sa carrière, il troque souvent le micro pour le stylo. Le verre et la fourchette ne sont jamais loin car Giacomo est un fin gourmet qui sillonne la péninsule à la recherche d’arguments appétissants pour les articles food & beverage qu’il publie sur différents sites web spécialisés comme www.ilforchettiere.it. Une bonne aisance rédactionnelle et une certaine culture littéraire lui ont permis d'écrire des livres dédiés au monde parfumé des cocktails. Parmi ses publications, Gingegneria Applicata en collaboration avec le collègue Federico Silvio Bellanca, le Decocktailone, un recueil à trois voix préparé en confinement et une nouvelle œuvre à paraître prochainement. 

Je lui laisse la parole...


De quelle façon vous êtes-vous approché de l’univers food & beverage ? 

J’ai 30 ans et j’ai commencé à m’occuper de food & beverage il y a cinq ans. J’ai toujours été fasciné par la cuisine, la mixologie et la movida. J’adore voyager et visiter de belles adresses. C’est une véritable passion que j’ai déjà vécu comme client et que retrouve maintenant en tant que professionnel. J’aime mon métier et je mesure au jour le jour la chance que j’ai en l’exerçant. Je n'arrête pas de me former et je remarque que, parmi mes collègues journalistes gastronomiques florentins et toscans, je suis souvent le plus jeune.


Justement. Quel est à votre avis, la meilleure façon de présenter les personnes qui travaillent dans ce milieu fascinant et savoureux ?

J’aime raconter mes expériences de façon immersive. Cette technique me permet de transposer mes sensations et de les partager avec les lecteurs. J’essaye de leur transmettre mon vécu tout en racontant les histoires cachées derrière un plat, une pizza, un cocktail, etc. Je crois en l’importance de contextualiser pour décrire le processus qui a mené à un certain résultat. J’en profite pour vivre la passion des coulisses avant de la raconter. C’est toujours intéressant de dévoiler les histoires de restaurateurs que tant de clients ignorent. J’ai un caractère extraverti et je réussis à tisser facilement des liens avec mes interlocuteurs. Ils ont plein d’anecdotes et de secrets à confier et j’essaye d’être toujours prêt à les écouter pendant les interviews, les visiter.   


Vous vous occupez chaque jour du football et de la cuisine. Quel est le lien entre ces domaines et comment ils se rattachent à votre expérience professionnelle ?  

Le foot et la cuisine sont les plus grandes passions des Italiens, et je ne fais pas exception. Je crois que leur caractéristique commune est le jeu d'équipe. Que ça soit dans un match  de troisième division ou de Champions League, ou dans un restaurant, les meilleurs résultats sont le fruit d’un travail collectif. Il s’agit de milieux dynamiques, colorés et pop. On pourrait croire qu’il s’agit de secteurs faciles à percer, et pourtant c’est exactement le contraire. Dans les deux cas, il faut affiner le regard avant d’avancer des jugements techniques. En tout cas le moteur est toujours la passion, celle qui anime les joueurs, les professionnels de la cuisine et les journalistes.


Vous avez récemment publié le Decocktailone, un livre né pendant la pandémie. Comment vous êtes-vous adapté aux contraintes imposées par la crise sanitaire et quel impact a-t-elle eu sur votre activité ? 

Heureusement je n’ai jamais arrêté de travailler, même pendant le confinement qui a bloqué l’Italie au printemps dernier. A la différence de la Ligue 1, le championnat italien a repris après quelques mois de stop, ce qui m’a permis ainsi qu'à mes collègues, d’avoir toujours des actualités sur lesquelles travailler. La pandémie n’a pas trop impacté mon quotidien de journaliste sportif, je suis simplement passé d’une rédaction de 20 personnes ou j’avais l’habitude de travailler en chemise, à mon appartement, où il m’arrive d'écrire en pyjama avec une tasse de café à la main. En tant que correspondant je collabore avec des nombreuses chaînes radio et TV étrangères (surtout espagnoles et d'Amérique du Sud) et ça n’est pas toujours facile de trouver le bon endroit pour les émissions en direct, mais j’arrive à m’organiser malgré tout. Pour ce qui concerne le journalisme gastronomique, ça été toute une autre histoire. Il a fallu une bonne dose de créativité pour pallier au manque d'événements. Je suis passé des visites en live de restaurants/caves/distillerie à des rendez-vous à distance, des dégustations en présentiel aux descriptions des menus et des cocktails proposés en delivery. J’en ai profité pour me faire plaisir, pour lancer des nouveaux projets parmi lesquels le livre le Decocktailone, qui est celui qui m’est le plus cher. Mon ami bartender (Federico Pempori) avait envie d'écrire des cocktails inspirés par les grands auteurs de la littérature italienne et internationale (Dante Alighieri, Gabriele D’Annunzio, Oscar Wilde...), mais son projet manquait de quelque chose, il n’avait pas d'ancrage contemporain. C’est ainsi que, pendant nos nombreux apéritifs virtuels, j’ai commencé à réfléchir sur la création d’un Decameron de la mixologie : le Decocktailone. Si on y pense bien, le livre relate les réunions Zoom qui ont eu lieu pendant 10 jours en pleine pandémie, autant de ressemblances avec le cadre de l'œuvre de Jean Boccace. A chaque rencontre le barman propose un drink (comme le Cocktail Lucifero), le photographe Martino Dini nous décrit la photo artistique qu’il va réaliser à partir de la recette et je lis un passage de l’auteur choisi. Ces bavardages virtuels nous ont permis de nous distraire et de tenir un journal intime de la quarantaine. Un récit parfois légèrement alcoolisé, mais plein de références littéraires. Nous sommes très satisfaits du résultat. En Italie, le livre a reçu un bon accueil et il a déjà été réimprimé trois fois. 


Quelles sont les perspectives des bars européens dans un futur proche ? 

Cette période a enclenché un mécanisme de sélection naturelle mais les survivants pourront profiter d’une belle reprise économique. C'était le cas après chaque crise. Les activités peu structurées et approximatives ne rouvriront pas tandis que ceux qui ont su se réinventer tout en gardant un lien avec la clientèle, seront gagnants. L’originalité et la qualité de l’offre primeront. Il y aura moins d’adresses, mais elles seront plus sélectionnées. Tel est mon pronostic, ou plutôt mon souhait. 


De quelle façon imaginez-vous le retour des clients au comptoir ? Quelles stratégies permettent d’envisager la reprise ?

J’ai hâte de siroter un bon boulevardier au comptoir de mon bar préféré, sans le masque sur le visage, sans le gel qui colle aux mains et sans avoir à me dépêcher pour respecter le couvre-feu. Je suis confiant car j’ai un exemple sous les yeux, celui de Florence, la ville où j’habite. Dès que les bars pourront ouvrir à nouveau, je sais que les Florentins seront prêts à soutenir un des secteurs qui a souffert le plus pendant cette crise. Et il ne s’agit pas d’une simple considération de professionnel. Les gens ont envie de retrouver leur quotidien et je suis intimement convaincu que quelques semaines de normalité suffiront à oublier ce que nous avons vécu. Aux professionnels du secteur je conseille d’être directs et transparents, de miser sur des propositions alternatives et accessibles, mais pas bridées (pour que la qualité n'en souffre pas...). Ils doivent savoir transmettre leur vision, soigner le service, prêter attention au contact avec le client et se réjouir de ces retours. J’ai remarqué que dans chaque bar et restaurant où j'ai été servi avec un sourire, mes dégustations étaient plus agréables.


Les événements vont reprendre, dont la Florence Cocktail Week à laquelle vous avez déjà participé. Quel est votre souhait pour la prochaine édition ? 

Florence est en pleine ébullition pour ce qui concerne la prochaine édition de cette manifestation qui est devenue un événement incontournable. C’est une kermesse à laquelle participent des professionnels et des passionnés venus de la Toscane, de l’Italie entière et des autres pays. Pendant la dernière édition j’ai présenté le Decocktailone et en occasion de la prochaine je parlerai de l'œuvre sur laquelle je suis en train de travailler. Je souhaite que nous puissions profiter de la prochaine Florence Cocktail Week d’une façon plus insouciante et plus libre. Que ça soit un beau moment de partage placé sous le signe de l’amitié, de la solidarité et du divertissement ainsi que l’occasion de participer aux formations dispensées sous forme de masterclass et de rencontres avec des invités de premier rang.


Comment interprétez-vous la tendance du "bien-boire" ? 

Le "bien-boire" témoigne tout d’abord d’un sens de la responsabilité et du respect, envers soi et envers les autres. L’ivresse pour l’ivresse est en voie de disparition aussi chez les jeunes. Boire consciencieusement signifie savoir ce qu’on boit, connaître les ingrédients qui composent les cocktails et les bouteilles employés pour les préparer. Cette vision impose des dépenses un peu plus élevées, mais elle permet aussi de vivre des expériences qualitativement bien plus intéressantes que celles qu’on peut avoir avec le classique Spritz à 5 euros, même si cette formule reste iconique, pas seulement aux yeux des touristes. L’envie de s’informer qui caractérise les consommateurs ces derniers temps est de bonne augure. J’ai remarqué que les gens sont curieux et posent plein de questions. L’origine des projets et l’histoire des cocktails les passionnent. Cet élan nous pousse tous au-delà de notre zone de confort pour partir à la découverte de l’univers de la restauration et de la mixologie, le début d’un voyage merveilleux !

 

Propos recueillis par Sara Rania

 

 

 

 

 

 

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