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Le levain, une passion dévorante…
Le 8 Janvier 2016

Le levain, une passion dévorante…

Bien que né près de Naples, c’est dans le nord de l’Italie que j’ai appris à faire les pizzas et ma pâte n’a rien de napolitain. Je suis de ces pizzaïolos que le destin a jetés dans les bras de la pizza et tombés amoureux de la pâte au levain.

J’ai fréquenté l’école hôtelière de Roccaraso dans les Abruzzes. En 4e année, le chef Alfonso Della Croce, devenu médiatique depuis, m’a pris dans sa brigade comme responsable des grillades. Malgré des débuts chaotiques, je suis resté près de 5 ans. C’est durant ces années que le destin a officié, me poussant vers la pizza. C’est un milieu peu évolué où l’on travaille souvent comme un robot à toujours faire la même chose chaque jour. Malgré tout, j’étais fasciné et attiré, bien décidé à donner le meilleur de moi-même derrière le banc à pizza. J’ai commencé par en faire pour le personnel puis par la suite pour les clients. Les collègues et la clientèle me faisaient remarquer qu’il y avait une différence avec ce qu’ils avaient connu jusque là, ce qui m’encouragea. Mais je sentais aussi que je ne pourrais pas continuer comme ça, à faire toujours la même chose, parce que la cuisine m’avait appris qu’il n’y a pas de limites et qu’il faut toujours chercher à apprendre plus. J’ai commencé par étudier la farine, la matière première la plus importante pour la réalisation d’une bonne pâte, puis les levures, leur maturation, l’eau, le sel et enfin aussi un peu la chimie. Approfondir toujours plus parce que ce sont les détails qui font la différence au-delà de la passion que met un pizzaïolo à faire sa pâte, elle ne suffit pas à ce que la pâte soit légère et digeste.

La rencontre décisive s’est produite en octobre 2012, quand m’a été proposé un poste de pizzaïolo à Paris. Le propriétaire de la pizzeria était quelqu’un de très ouvert qui voulait faire les choses en grand, proposer plusieurs types de pâte à pizza, de la classique à la multi-céréales en passant par le dessert et la pizza sans gluten. Le succès fût immédiat, la pizzeria commençait à très bien marcher.

Nous avons alors décidé de travailler au levain et j’ai été conquis tout de suite, comme s’il s’agissait d’un être sur lequel veiller, à cajoler. J’avais fait des recherches, étudié, et j’ai essayé de reproduire au mieux ce que j’avais appris dans les livres et sur internet. Les résultats étaient parfaits et les clients ont tout de suite compris que quelque chose avait changé en mieux, le parfum de la pâte, son goût, elle était plus digeste.

Mais je voulais aller encore plus loin et je me suis rapproché d’un maître du levain, Cristian Zaghini, pour connaître au mieux ce produit, approfondir et comprendre ce qui se passe dans une pâte qui lève naturellement par la seule force de la nature, comment gérer le levain pour l’avoir toujours prêt quand on en a besoin, saisir pourquoi le levain a plus de succès que la levure de bière. La pâte au levain lui doit ses qualités grâce aux 3 fermentations, alcoolique, lactique et acétique, contrairement à la seule fermentation alcoolique de la levure de bière.

Aujourd’hui comme au premier jour je suis toujours en quête de quelque chose de nouveau pour me tenir à jour, garnitures, empâtements, nouvelles techniques et méthodes de cuisson.

La pizza est un art et une culture qui supposent connaissance et recherche.

Ma nouvelle lubie : les panettones. Ils  sont en phase d’expérimentation. Je suis allé suivre un stage à la pâtisserie Casa del dolce de Cologna Veneta pour apprendre à les préparer. Pour le moment j’utilise de la levure de bière mais j’espère passer au levain au printemps… C’est une démarche personnelle en même temps qu’une corde de plus à mon arc pour un produit que j’ai appris à connaître puis à aimer passionnément jusqu’à lui adresser une vraie déclaration :

Ca ne sera pas facile, au contraire ça sera même très difficile et nous devrons y travailler au jour le jour, mais je suis prêt parce que je te veux.

Je veux tout de toi. La terre, les parfums, le bien-être te caractérisent et me font me sentir bien avec toi.

Tu es la terre parce que tu es naturel, des riens qui sont tout, de l’eau et de la farine.

Tu es parfum, piquant, acidulé, en lien avec mon état d’âme parce que toi et moi ne faisons qu’un. Tu es arôme, celui de tes levages, des bactéries que tu captures à chacun de tes mouvements.

Tu es bien-être parce que tu travailles tellement, pour nous tous, pour nous faire nous sentir comme des papillons aux ailes légères avec juste un filet de voix pour t’en remercier.

Tu es le sourire sur mes lèvres, la lumière dans mes yeux. Chaque fois que je t’effleure, une brise court sur ma peau, et lorsque je t’entaille d’une croix, c’est le moment précis où mon plaisir est à son paroxysme.

J’attends ensuite la floraison de ta rose qui permet à notre âme d’atteindre le sublime et le rare.

Toi et moi pour toujours, chaque jour.

Par Gianpaolo Camarca, pizzaïolo à la pizzeria Quadrifoglio (Paris)

 

Propos recueillis par Carole Gayet

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