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Un coup d’œil suffit à identifier un « faux » restaurant italien
Le 2 Juin 2014

Un coup d’œil suffit à identifier un « faux » restaurant italien

Un coup d’œil suffit à identifier un « faux » restaurant italien

J’ai quitté ma Sardaigne natale il y a 3 ans pour travailler en France à la fois pour m’y faire une expérience mais aussi et surtout parce que Paris me fascine, c’était un peu un rêve. En tant que chef du restaurant Guy Martin Italia, c’est aussi pour moi l’occasion de voir si mon amour pour la cuisine de mon pays peut séduire les Parisiens. A mon avis, la cuisine italienne ne se prépare pas pour se nourrir mais par amour, par sentiments, elle évoque des souvenirs, un acquis culturel, je la considère comme une femme, je suis en communion avec elle. Cette expérience parisienne est importante car je m’y enrichis aux côtés de grands chefs, ce que j’apprends nourrit ma propre cuisine, mais elle me demande des sacrifices car la vie parisienne est loin de ma vie. Ma Sardaigne me manque…

La cuisine italienne qui est proposée en France est différente de celle qui se pratique en Italie car on ne trouve pas les mêmes produits. J’ai l’habitude du poisson à peine péché, des légumes à peine cueillis. Même si à Paris on trouve de tout on ne trouve pas facilement la qualité. Chez Guy Martin Italia nous avons la facilité de les faire venir d’Italie, un privilège que tous les restaurants ne peuvent pas toujours se permettre. Je suis heureux que ce grand chef parisien valorise les produits. C’est aussi un amoureux des pâtes, préparées maison. La carte n’est pas sarde à 100% car elle a vocation à être généraliste et de toutes façons il est plus que difficile de trouver des produits de chez moi en France. Nous n’avons inscrit qu’un seul plat sarde à la carte avec des pâtes fregola. J’ai voulu les proposer car elles font partie de mon enfance. C’est Alain Ducasse qui le premier les avait introduites à son menu il y a quelques années. La recette que je propose a déjà changé 3 fois cet hiver, j’en ai servi avec de l’agneau, puis avec de la pancetta, et en ce moment avec des moules et de la ciboulette. Beaucoup de restaurants que je connais en proposent aussi. La fregola est d’origine antique, une sorte de couscous revisité, le grain est un peu plus gros, plus dur, c’est une pâte sèche à base de blé dur. Dans la tradition sarde elle se cuisine avec un bouillon, des palourdes, des tomates. Elle était consommée souvent car c’est à l’origine un plat de pauvre. Depuis quelques années on la trouve un peu partout en Italie où elle est cuite et servie comme un risotto.

Pour ma consommation personnelle je me fais expédier des produits de Sardaigne pour retrouver les odeurs et les goûts, mais j’ai aussi besoin de retourner sur place. Ici, je vais sur les marchés trouver des petits maraîchers, bouchers… Je connais une poignée de restaurants sur Paris où je sais que je pourrais bien manger comme à la maison, tels que le Fontanarosa ou le restaurant de cuisine sarde Quattro Mori* tenu par un de mes concitoyens, ou Samesa près des Champs Elysées où j’ai travaillé.

Les clients parisiens auxquels j’ai à faire sont exigeants mais séduits par la simplicité, émus par la qualité du produit, sa présentation. Si nombre de clients se prennent pour des masterchefs, la clientèle de GMI est un peu différente, elle cherche l’originalité et non les standards. Elle a conscience du travail qu’implique la qualité des produits qu’ils ont dans leur assiette. Si la plupart des Parisiens ont perdu le lien avec les paysans, le pêcheur, celui qui produit le fromage ou celui qui est proche des animaux, c’est différent en région comme en Bretagne ou dans le sud de la France.

Pour ce qui est de l’Italie, nombre de Français semblent ne jamais y être allés, alors il faut leur faire comprendre que les spaghetti à la carbonara ce n’est pas de la cuisine italienne quand ils sont préparés avec de la crème liquide et du beurre. Ils doivent les goûter cuisinés à l’huile d’olive pour comprendre que c’est très différent. L’idéal est d’aller en Italie pour connaître l’authenticité. Rien qu’à la lecture d’un menu, il est facile de détecter qu’un restaurant ne propose pas une vraie cuisine italienne. Un indice : un large choix de plats de pâtes de surcroît avec des sauces à base de crème fraîche.

* par référence au drapeau de la Sardaigne

Par Marco Loi, chef du restaurant Guy Martin Italia à Paris

 

Propos recueillis par Carole Gayet

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