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La France comme débouché privilégié aux produits italiens d’exception
Le 29 Août 2015

La France comme débouché privilégié aux produits italiens d’exception

Originaire de Vénétie, je vis en France depuis 2003 où je suis agent commercial pour plusieurs grandes maisons de produits alimentaires d’Italie. Préalablement j’avais travaillé dans l’hôtellerie de luxe sur la partie restauration, en Angleterre et en France pendant près de 15 ans.

Ce que je constate depuis 3-4 ans relève du paradoxe : à savoir qu’aujourd’hui on arrive à trouver en France des produits qu’on ne trouve nulle part en Italie. La vie est tellement chère en Italie, il y a une inversion, on va bientôt manger mieux italien en France que dans la Botte parce que les débouchés pour les produits y sont meilleurs. Par exemple Alessandra chez RAP vend du Vialone Nano Melotti un riz séché au soleil qui n’est vendu qu’à Paris, car de toutes façons la production est trop faible pour qu’il y en ait pour tout le monde.

Les marques italiennes prennent des ambassadeurs de leurs produits en France. C’est le cas par exemple pour le consortium du grana padano avec le restaurant italien Ida ouvert dernièrement sur Paris. Fabrizio Ferrara (Caffè dei cioppi puis La Dispensa, Pizza dei Cioppi) a été le premier client parisien de Riccardo Felicetti à mettre à l’honneur et à cuisiner les pâtes sèches fabriquées par l’entreprise familiale depuis 1908, sponsor d’Identità Golose, manifestation dédiée à la cuisine et la pâtisserie italiennes d’auteur depuis 2004.

Du côté de la demande, on constate que les restaurants gastronomiques de cuisine italienne ou française en France sont de plus en plus exigeants sur les produits. Pour les câpres par exemple, ils veulent celles de tel calibre, de telle provenance en Italie, de tel producteur.

Un commerçant a plus de chance de vendre une confiture en précisant qu’il s’agit de marmelata di limone di Sorrento DOP qu’en indiquant seulement confiture de citron d’Italie. Simone Sabadi qui a fait connaître le chocolat de Modica de Sicile fait un tabac en ce moment avec de nouveaux bonbons au miel des abeille noir , sucre de canne, huiles essentielles Slow Food, sans colorant. Le phénomène s’accompagne d’un contexte en faveur de l’écologie avec des produits, naturels. La tendance est identique pour les produits d’origine française. Le côté très positif, c’est que petit à petit, à force de goûter à la qualité, le palais des consommateurs s’affine et s’éduque.

Ce constat ne se vérifie pas partout dans l’Hexagone. Je dirais même que c’est très francilien notamment parce que Paris a un accès unique au monde aux produits avec Rungis, mais aussi parce que tout le monde n’a pas la même représentation des produits italiens. Contrairement aux Parisiens, les Niçois, par exemple, pourtant proches de la frontière, ne sont pas amateurs de produits de niche comme les cialde di Montecatini (grandes gaufrettes rondes fourrées) ou la pizza au friarielli (Menù). A Strasbourg, c’est la crème d’artichaut qui n’a aucun succès, au point qu’on ne la retrouve même pas à la carte d’une enseigne nationale qui l’utilise dans d’autres de ses restaurants. Ca s’explique aussi par la météo.

Même si on a connu une évolution à la hausse qui a fait tâche d’huile grâce à des gens comme Fabrizio Ferrara (cf supra) ou Julien Cohen (cf supra), Alessandra Pierini (épicerie RAP), Massimo Mori (Mori Venice Bar et Armani Caffè), les Français au global, conservent une vision déformée de la cuisine italienne. Dans les restaurants dits italiens, on en a fini avec la fiasque de vin d’il y a 50 ans mais il n’est pas rare de trouver de la pizza bolognaise ou avec de l’œuf en France, ce qui est inconcevable en Italie.

C’est tout l’intérêt d’un cercle restreint de protagonistes de la restauration italienne à Paris, elle a un rôle de garde-fou, permettant de garantir le niveau de qualité et d’authenticité atteint et d’en poursuivre la diffusion.

Par Filippo Giarolo, agent commercial pour plusieurs grandes maisons de produits alimentaires d’Italie

Propos recueillis par Carole Gayet

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