Mozzarella mon amour

La pizza. Chacun de nous en a fait la rencontre à un âge précoce. Dans un restaurant, à la maison, dans une pub TV, un film du dimanche soir... On se souvient d'elle de nombreuses fois, dégustée dans "Manhattan", "Retour vers le futur", "ET l'extraterrestre"...

Tant de merveilleux souvenirs de jeunesse sans même s'attarder réellement sur son contenu : tomates, champignons, jambon, et toi, ô toi... ce n'est que très tard que je t'ai vraiment découverte. La mozza.

Je ne parle pas de ce fromage sans tain qui ne reflétait que la médiocrité d'un mets bon marché dragué à la va-vite au détour d'un rayon surgelé. Cette mozza de supermarché qui, même en l'absence de personnalité gustative avait déjà le mérite de rendre sexy une pizza trop ronde pour être honnête mais suffisamment généreuse pour satisfaire mon estomac de jeune dalleux impubère.

Des années après mes errances gustatives propres à mon statut d'étudiant, j'installais ma vie d'adulte à deux pas d'un traiteur italien. Et là, je découvris tout un monde en "a". A côté des jambons de Parme, specks, mortadelles, parmesans et gorgonzolas, elles étaient là, les mozzas. Elles étaient nombreuses et toutes merveilleuses, la pureté qui s'en dégageait m'a enivré. Elles avaient des noms qui respiraient le soleil et la dolce vita : bufala, burrata, scamorza... Ma préférence alla naturellement vers la bufala di Campana qui ne quitte plus depuis, l'étage supérieur de mon frigo dédié à mes amours de tous les jours.

Il m'arrive parfois de m'attarder sur les préliminaires. En l'accompagnant assez classiquement d'huile d'olive grecque, de basilic et de tomates fraîches. Mais la plupart du temps, mon désir est trop ardent et sitôt revenu de la Cooperativa latte, je la déshabille - ou plutôt je lui arrache l'emballage - pour faire fondre illico sa tendre chair au contact de mon palais en émoi.

Cela fait 20 ans que cela dure. Il y a des ingrédients dont on ne se lasse pas. Pour moi, c'est la mozza.

Par Olivier Derouette, directeur de création du studio Black Pizza

Propos recueillis par Carole Gayet